Petit cours de toponymie provençale

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Certains randonneurs préparent leurs sorties à l’aide d’un logiciel de cartographie et d’un gps. D’autres préfèrent continuer à utiliser une carte « papier ». Quelle que soit la méthode adoptée, l’utilisateur est parfois confronté à une terminologie locale dont le sens lui échappe le privant ainsi d’une importante information. Je vous propose une série d’articles qui vous expliqueront le sens de certains toponymes que vous avez souvent l’occasion de rencontrer au cours de vos balades.

Blache

toponymie01.JPGBlache désigne en provençal un lieu planté de chênes pubescents appelés aussi chênes blancs. En Haute-Provence, on trouve La Blache, Les Blaches, La Blachère (de blatchò). Plus au sud, dans le nord du Var, on trouve La Blaque, les Blaques, la Blaquière (de blaco ou blacas pour désigner le chêne blanc). On a aussi : Les Blaquets, La Blaquette, Les Blaquiers, etc

Colle

toponymie02.jpgVoilà un terme bien étrange ! Il ne s’agit pas d’un produit destiné à lier ensemble deux éléments mais tout simplement d’une colline ! Ainsi, si vous tombez un jour sur l’expression « la colline de la Colle » vous aurez le droit de sourire en pensant à cette « colline de la colline » !

Certains pensent que le mot provençal  « colle » signifie « col » en français. Il n’en est rien car en provençal un col se dit « pas ». Ce terme a donné son nom à un hameau de Saint-Victoret : Le Pas des Lanciers.

Charles Rostaing a étudié le toponyme « Pas-des- Lanciers » en détail. Le pas-des-Lanciers, C. Rostaing, nouvelle revue onomastique, 1994. En comparant avec d’autres lieux portant le même nom, d’autres variantes de la langue provençale, il retient lou pas de l’ancié dans le sens de « le pas de la brèche ».

Dérivé du mot colle, on trouve aussi parfois le mot couelle : La Vieille Couelle au sud de Peyrolles. Les termes collet ou coulet désignent une petite colline.

Au singulier ou au pluriel, ces mots entrent tout naturellement dans la formation de noms de  lieux-dits : La Colle Saint-Michel, le Pas de la Colle, Le Collet de Roux, Les Coulets, Les Collets Rouges, etc

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Les trois chapelles de Digne sur le mont Calvaire

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Lcircuit de randonnée des trois chapelles, facile, passe par trois chapelles bien connues des Dignois : la chapelle Notre-Dame de Lourdes, la chapelle Saint-Vincent et la chapelle de la Croix. Chacune a ‘son’ histoire, ‘son destin’, mais qui les connait aujourd’hui ?

Notre Dame de Lourdes, réplique de la balisique de Lourdes

IMG_7116.JPGLa grotte sous la chapelleLa plus surprenante, Notre Dame de Lourdes, au dessus de l’ancien petit séminaire, Notre Dame de Lourdes se veut en effet une réplique en miniature de la balisique Notre Dame de Lourdes : elle est bâtie au-dessus d’une petite grotte. Le chanoine Reymond, directeur principal du petit séminaire, la fait construire en 1870. Deux messes matinales y étaient célébrées chaque samedi de mai et juin et attiraient beaucoup de monde. Comme seule une cinquantaine de personnes pouvaient y pénétrer, les autres demeuraient sur la plate-forme devant la porte. Les soldats se recommandaient à elle, les ex-voto en témoignent, les étudiants y priaient avant leurs examens.

IMG_7119Elle fut restaurée en 1958 pour le centenaire des apparitions de Marie à Lourdes. On lui donna alors une voûte bleu ciel avec des bordures aux couleurs de la Provence rouge et or, partiellement visibles aujourd’hui. Une nouvelle série de travaux fut effectuée en 1977 mais peu de temps après, de jeunes vandales l’ont saccagée : un clocheton a été abattu, la cloche a disparu, les vitraux ont été brisés à la carabine, les murs couverts de graffitis, les portes arrachées et le plancher défoncé.

La chapelle Saint-Vincent et le prieuré, mille ans d’épreuves

Repères historiques

  • IMG_7138Située sur la colline dominant la chapelle Notre Dame du Bourg, la chapelle est mentionnée  en 1180 dans les bulles d’Alexandre III et en 1184 dans celle de Lucius III. Saint-Vincent, premier évêque de Digne, aurait fait un séjour sur cette colline.
  • 1349 : transfert des reliques de Saint-Vincent à la cathédrale
  • Le sanctuaire devient un prieuré du chapitre de Notre Dame du Bourg et en dépend jusqu’en 1495, date à laquelle l’évêque Antoine Guiramand l’incorpore à l’ordre des Frères de la Sainte-Trinité et de la rédemption des captifs qui y établissent leur couvent.
  • Durant les guerres de religion, Lesdiguières attaqua la chapelle que l’on avait fortifiée et qui résista une journée ; pendant la nuit, les soldats chargés de la défendre y mirent le feu et s’enfuirent. L’église et le couvent restèrent à l’état de ruines jusqu’au moment où Honnorat Blanc, curateur des biens du monastère, parvint à remonter en partie l’église du couvent. Au sommet de l’arceau ogival séparant le sanctuaire de la nef, se lisait encore en 1839 l’inscription signum redemptionis nostrae 1597.
  • L’édifice fut rétablie non plus en pierres de taille mais en tuf équarri. L’évêque de Digne lors de sa visite épiscopale  en 1606, rapporte que l’église est à demi couverte et assez mal bâtie. Les Trinitaires déménagent en ville.
  • Vendue en 1770 au Grand Séminaire, confisquée pendant la révolution comme bien national, elle fut vendue à Charles et Antoine Bayle. Seule l’abside pouvant servir de grenier à foin, fut sauvée.
  • En 1924, elle revint au clergé qui y célébra la messe pendant quelques années puis l’abandonna.
  • Bombardée en 1944, elle a été restaurée en 1950 grâce aux indemnités de dommages de guerre.

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La chapelle Saint-Jean de Fusils à Saint-Michel l’Observatoire

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Le cadre de la chapelle

IMG_0067.jpgIMG_6388.JPGLe quartier d’Aurifeuille1 à Saint-Michel l’Observatoire, tout près du parking de l’observatoire, sur un petit plateau dominant, comme souvent quand il s’agit de chapelles Saint-Jean. Elle vous accueille par une allée de tilleuls, une petite fontaine qui devait désaltérer les pélerins et quelques chênes préservés du feu des charbonniers grâce à un amoureux des arbres.

D’Aurifeuille, site occupé au néolithique, la tradition populaire y a placé une fabrique d’armes gauloises en bronze. D’autres traces d’occupation dès l’antiquité y ont été trouvées. Vers 1045, on trouve un hameau, villa de Fuzilis dont il ne reste aujourd’hui que la chapelle. De nombreuses tombes truffent le sous-sol alentour. Le site a peut-être été occupé jusqu’au Haut-Moyen-âge, ce qui expliquerait la création du prieuré rural médiéval qui jouxte la chapelle.

La chapelle Saint-Jean-de-Fuzils date du XIIè siècle

IMG_0081.jpgRaymond Collier, ancien archiviste des Alpes de Haute-Provence pense que les « …des éléments archaïsants : fenêtre axiale, corniche soutenue par des consoles ornées d’enroulements spiraliformes incitent à placer la chapelle vers le début du siècle ». Géraldine Bérard et Guy Barruol confortent cette hypothèse à cause de l’absence de contreforts et de voûte. Son abside voûtée en cul-de-four, coiffée de lauzes, est sûrement plus ancienne. Son autel est constitué d’une table en pierre posée sur des colonnettes préromanes à chapiteaux cubiques. L’abside est légèrement dissymétrique. Elle est classée à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques.

IMG_0069.jpgIMG_6304.JPGLa façade porte la date de 1783 correspondant à la date de sa réfection. Dans le bois gravé au-dessus de la porte, l’inscription en latin contient une faute d’orthographe mais se comprend fort bien : « Sancte Joanne Bapti(s)ta ora pro nobis ». La porte extérieure de l’ermitage porte une élégante accolade à trois pointes.

L’ermitage

Appartenant d’abord à l’abbaye de Saint-Victor, au XIIè siècle, Saint-Jean de Fodils ou de Fusilis comptait, parmi les possessions de l’abbaye de Saint-André de Villeneuve-les-Avignon, tout comme l’église paroissiale Saint-André, le prieuré de Salagon à Mane et Notre-Dame de Châteauneuf.
IMG_0087.jpgIMG_0088.jpgDepuis une porte située à l’intérieur de la chapelle, on accède à l’ancien ermitage qui accueillit aussi bien des religieux que des laïcs, jusque vers 1850 . L’ermite faisait la cuisine en bas et dormait à l’étage. L’association a reconstitué avec beaucoup de réalisme l’environnement du dernier ermite : rideaux de coton épais, lit et table de bois, chapelet et missel, et même les ventouses pour se soigner ! Dans une niche du couloir d’accès à l’étage, un peu de matériel pour se laver.

IMG_0084.jpgSuite à des recherches aux archives, l’amie qui nous organise la visite, a retrouvé la trace d’un ermite, simple laïc, se nommant Jacques Rochon. Sa mère s’appelait Anne-Marie de Bosque et son père Jean-Baptiste Rochon. Son frère Gabriel était prêtre. Son père est mort en 1690 et sa mère en 1703. Il serait enterré ici.

Restauration

Très attachés à leur chapelle, les habitants ont collecté durant 30 ans l’argent nécessaire à la fabrication de la cloche. Le clocher a été installé dès le projet commencé vers 1840 mais la cloche n’a pu être placée que 30 ans après !

Pour entendre l’excellente sonorité de la cloche (format WMV)

IMG_0091.jpgIMG_0082.jpgUne réplique de Notre Dame de Fourvière trône désormais sur l’autel. La chapelle a été restaurée par les Amis de Saint-Jean vers 1980. En effet, l’abside menaçait de s’écrouler en 1978 et la municipalité n’avait pas les moyens d’entreprendre les travaux. Parmi les nombreux donateurs, un artiste a fait cadeau à l’association du vitrail de la fenêtre du fond ; l’association a ensuite acheté les matériaux pour les deux autres vitraux.

La tradition de procession autour de la Saint-Jean, est maintenue mais l’effort des pèlerins est désormais très limité puisque le cortège part du parking de l’observatoire et non du village.

Bibliographie

La Haute-Provence monumentale et artistique, Raymond Collier, Digne, Imprimerie Louis Jean, 1986
Carte archéologique de la Gaule, 04, Géraldine Bérard, Guy Barruol, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 1997
Pays de Lure Forcalquier Manosque, P. Ollivier-Elliott, Edisud, 2000

1aurifeuille : viendrait de la couleur des feuilles en automne ou du vent (auro en provençal) ou de paillettes d’or que l’on trouvait encore vers 1960.