Tout a commencé, comme d’habitude, par la prise d’informations sur le lieu d’une randonnée au pied du massif de l’Etoile, à partir du domaine de la Nègre, racheté par le département en 1987 et qui s’étend sur Château-Gombert et Plan-de-Cuques. J’ai voulu enquêter sur le pourquoi de la dénomination La Nègre. J’ai éliminé les informations données par l’office du tourisme car les sources et l’auteur ne sont pas cités.
A l’aide de André S. auteur du site story.gombert, qui m’a aidée dans ma réflexion, j’ai entamé une recherche sur « nègre » qui, en toponymie, ne se rencontre qu’en Occitanie : l’explication doit donc être recherchée dans l’histoire de la Provence ou la langue.
Nègre employé comme adjectif :
Souque Nègre (la Destrousse), cap Nègre (Var), Mourre Nègre (Luberon), château Noir au Tholonet, Teste Nègre, lac Nègre (06), cime Nègre (06). Nègre est un qualificatif pour sombre, noir, voire profond s’il s’agit d’un lac (Hypothèse 1). Dans la Nègre, le substantif a pu être éludé : la (maison) nègre.
Nègre employé comme nom :
Coteau du Nègre Roquevaire, lieu-dit la Nègre Peynier, domaine de la Nègre à Château-Gombert. Pour Roquevaire, nous y apprenons que vivaient dans le quartier deux familles Négrel. Pour Peynier,
Louis Antoine de Thomassin de Peynier, appelé plus simplement Antoine de Thomassin, comte de Peynier, né le 27 septembre 1731 à Aix-en-Provence, et mort le 11 octobre 1809 à Arance, est un officier de marine et administrateur colonial français des XVIIIe et XIXe siècles.[…] En 1796 il devient gouverneur général de Saint-Domingue.
Je n’ai pas trouvé d’autres exemples dans la région.
L’origine viendrait donc du nom d’un habitant du quartier : Nègre, Négrel (ancien nom de la commune de Chateauneuf-le-Rouge où vivait une famille de ce nom), ou surnom …dit le Nègre (hypothèse 2), d’un lieu de résidence (hypothèse 3) ou d’une fonction (hypothèse 4) qui relierait le propriétaire à une colonie où vivaient des esclaves noirs ou Noirs affranchis. Mon enquête portera sur ces hypothèses.
Ce toponyme figure sur la carte de Cassini (Le Nègre, 1740 – Merci Gilbert G. pour l’information), et sur celle du cadastre napoléonien de Château-Gombert, 9e section I1 (3 P 1153) établi en 1820 : dans cet état de section la Nègre (féminin) est une maison rurale appartenant à JULLIEN Delouide, décédé le 22/11/1816 à Chateau-Gombert ; elle est entourée de plusieurs parcelles de vignes, de bois. Il n’y a que trois propriétés bâties : Palama, La Grande Bergerie, et la Nègre. La section A1 des Montblancs, sur Plan de Cuques, appartient à sa veuve Jeanne SAUVAIRE ; on y trouve la source des Ouides et des broussailles. Le surnom Delouide (= de l’Ouide1) donné à Nicolas JULLIEN est si bien ancré dans la région qu’il s’est substitué à son nom ; même pour l’administration, il est connu comme JULLIEN De Louide comme en témoigne le journal des expropriations au moment de la construction du canal de Marseille. Ses enfants héritiers du domaine, sont Joachim Nicolas Marie et Jean-Baptiste Dorothé Gratien.
« Nègre » est apparu à la moitié du XVIIIe ; pour être enregistrée sur une section du cadastre napoléonien, la dénomination doit avoir été communément utilisée et confirmée par les habitants lors de l’enquête orale des géographes. Je vais donc établir l’ascendance de JULLIEN Nicolas sur quelques générations grâce à Pierre R. du site gombertois.fr qui m’a donné les premières informations généalogiques et grâce aux sites internet geneanet, geneprovence, familisearch, et filae auquel j’ai dû m’abonner pour un mois.
Conventions : ° naissance (+ décès) x mariage ChGo : Chateau-Gombert.
Note : les personnes aux rangs 5, 6 et 7 ne sont pas conformes à la généalogie parue dans l’histoire héroïque et universelle de la noblesse de Provence, vol.3
GIUGLINI (en français JULLIEN) et BONADIO sont deux familles italiennes émigrées en France au XVIe
- Balthazar (François ?) JULLIEN x Virginie BONADIO
° env. 1580 - Mathieu (François ?) JULLIEN x Catherine BOURTOUMIEU
(en provençal BOURTOUMIEU = BARTHELEMY)
°18-07-1605 (+ avant 1667) x ??? - Nicolas JULLIEN x Françoise BARTHELEMY
° 18/6/1633 St-Martin Marseille (+ 29/06/1711 Accoules) x 1667
A la date du 6/9/1667 de l’acte de mariage la femme de Nicolas JULLIEN se nomme Françoise LOMBARDON(NE) ? Parrain du chevalier Nicolas ROZE - Pierre Nicolas JULLIEN x Claire BOUTASSY
°8/6/1668 Marseille (+20/05/1732 ChGo) x 9/6/1701. Nommé échevin en 1701. - Nicolas Barthélémy JULLIEN x Madeleine LESBROS
°1701 (+ ?? ) x 20/04/1745 St-Ferreol - Nicolas JULLIEN Delouide x Marie-Françoise DE SURIAN
°02/03/1746 (+ 22/11/1816 ChGo) x 24/11/1772 Accoules- Joachim Nicolas JULLIEN x Marie Anne FABRON
°12/27/1775 St-Ferreol (x 24/08/1809) + après 1828. Il est négociant au moment de son mariage. Il a un fils Barthélémy Joachim JULLIEN x Jeanne Clément MARON - Jean-Baptiste Gratien JULLIEN x Jeanne MARON.
°18/12/1784 ChGo (x 23/04/1828) + ??? . Les parrains sont J.-B. Agnel, négociant et Daumas, courtier royal.
Les actes – que j’ai presque tous récupérés en ligne sur le site des archives départementales des Bouches-du-Rhône, nous apprennent que Nicolas Jullien Delouide est écuyer au moment de son mariage – appellation conférée à titre honorifique à quelqu’un qui remplit de hautes charges, chevalier de l’ordre du mérite et échevin ; les échevins élus par les bourgeois ou l’ensemble des habitants, s’occupent des affaires communales ; ils sont classés en 5 ordres : noblesse, avocats, négociants, bourgeois, marchands.
Le Nicolas JULLIEN du XVIIe est cité dans l’Armorial de la ville de Marseille : recueil officiel dressé par les ordres de Louis XIV / publié pour la première fois d’après les manuscrits de la Bibliothèque impériale, comte Godefroy de Montgrand, Marseille, 1864Continuer la lecture de Enquête sur l’origine de la Nègre, domaine départemental
- Joachim Nicolas JULLIEN x Marie Anne FABRON