Antoine de Saint-Exupéry : la vérité sur sa mort 60 ans après

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Dans de nombreux livres, sur de nombreux sites internet, les circonstances de la mort de Saint-Exupéry ne sont toujours pas explicitées ; jusqu’à très peu de temps, on ne connaissait ni le lieu exact, ni les circonstances de sa disparition. A partir de sources les plus proches possibles des découvreurs, cet article a pour but d’énumérer les principales péripéties de l’enquête émaillée de quelques fausses pistes.
Première publication : 5 avril 2013. Mise à jour : 23 octobre 2016.

Sur le même thème Autoportrait de Saint-Exupéry en Petit Prince pendu

Biographie
L’enfant

Jean de Saint-Exupéry rencontre Marie Boyer de Fonscolombe, arrachée à sa Provence natale. Il l’épouse le 8 juin 1896 et le couple s’installe à Lyon.

Antoine, né le 29 juin 1900 à Lyon, est le troisième d’une famille de cinq enfants. Turbulent et désordonné, Antoine invente continuellement des jeux en exigeant des autres de s’y soumettre. Il écrit des vers et se fâche quand on ne l’écoute pas avec attention. Il fait preuve d’une étonnante curiosité pour les moteurs, les trains et les engins volants. Plus tard, il déposera quelques brevet d’invention à l’INPI.

Le pilote
  • Antoine vole la première fois en juillet 1912. Ayant obtenu son brevet civil en 1921, il reçoit une formation de pilote militaire au Maroc, dans les environs de Casablanca où il est muté le 2 août 1921. De retour du Maroc il est dirigé sur Istres (Bouches-du-Rhône) où il s’entraîne sur un vieil avion Caudron G3. Le 23 décembre 1921, il obtient son brevet de pilote militaire. Le 5 février 1922, il est nommé Caporal. Le 3 avril 1922, il est admis élèveofficier de réserveIl a une réputation d’incorrigible distrait.
  • Sur recommandation d’un ami de la famille, le général Barès, Antoine de Saint-Exupéry est engagé par la Compagnie aérienne française (C.A.F.) en 1924.
  • En 1926, Antoine de Saint-Exupéry est recruté par Didier Daurat à Toulouse Montaudran ; il fait son entrée à la Compagnie Générale d’Entreprise Aéronautique (C.G.E.A.), dirigée entre autres par Pierre-Georges Latécoère. Enfin,il rejoint la famille des pilotes Jean Mermoz et Henri Guillaumet.
  • En avril 1931, à Agay (Var) où réside sa soeur, il se marie avec Consuelo Suncin, à la fois écrivaine et artiste salvadorienne qu’il a connue à Buenos Aires. Elle décèdera en 1979.
  • Après une année au service du courrier, Antoine de Saint-Exupéry est nommé chef d’aéroplace à Cap Juby (Tarfaya). En décembre 1935, il se lance dans le raid Paris-Saigon.
  • En janvier 1938, il renouvelle l’aventure et tente le raid New-York-Terre de Feu sur son nouveau Simoun modèle C635. Accompagné du fidèle André Prévost, il embarque à bord du paquebot Ile de France, emportant le Simoun démonté.
  • Dans les jours qui suivent la déclaration de guerre de la France à l’Allemagne le 3 septembre 1939, Antoine de Saint-Exupéry est mobilisé. Il est affecté à la base de Toulouse-Francazal dans une unité de bombardiers où il doit suivre des cours de formation. Cette situation à l’arrière lui déplaît : il veut voler.
  • Le 1er avril 1943, désespéré de ne pas servir son pays, il obtient de la mission Béthouart un ordre de mobilisation. Désormais, les hommes sont intégrés dans le groupe de reconnaissance photographique commandé par le colonel E. Roosevelt. Les appareils de son groupe sont des Lightning P38 ; le règlement établi par les Américains interdit à ceux ayant dépassé la trentaine de piloter ces engins (650 km/heure, 13000 m d’altitude). Il est âgé de 43 ans. Avec une dispense exceptionnelle, en juin 1943, il est autorisé à voler. Le 19 juin, il est reconnu provisoirement apte à voler en P38.
  • Le 25 juin 1943, il est promu commandant et le 29 juin il subit avec succès un test médical. Le 2 juillet, il suit son unité à La Marsa (Tunisie). Le 21 juillet, il effectue sa première mission de reconnaissance au-dessus de la Côte d’Azur. Au retour de la seconde, des incidents de pilotage et une certaine nonchalance en ce qui concerne les consignes techniques lui valent d’être suspendu de vol le 1er août 1943.
  • Après avoir multiplié les entrevues et les suppliques, il obtient l’autorisation de voler à nouveau. Il est affecté à la 31escadre de bombardement début avril 1944. Le 16 mai 1944, il obtient son détachement de la 31e escadre (Sardaigne). Le 14 juin, son premier vol de reconnaissance se déroule au-dessus de Rodez et d’Albi. Le 23 juin, sa seconde mission l’emmène vers Avignon. Le 29 juin, jour de son anniversaire, il vole au-dessus de Grenoble.
  • Le 17 juillet 1944, son unité est transférée à Borgo (Corse) : de là, les hommes doivent préparer le débarquement de Provence.
  • Le 31 juillet 1944, il prend place dans le Lightning n°223 pour une mission de reconnaissance sur la région de Grenoble et Annecy. À 8h35, il décolle de la base de Borgo sa dixième mission dont il ne reviendra jamais. C’est sans doute René Gavoille qui écrira sur le carnet d’activité aérienne, une simple mention : « Mission photo en haute altitude sur le sud de la France. Non rentré. »

Eléments extraits du site officiel 

Quelques unes de ses oeuvres

Écrit pendant son séjour en Argentine, Vol de nuit reçoit un accueil enthousiaste des lecteurs dés sa parution en 1931.

Conte poétique et philosophique, Le Petit Prince est d’abord publié aux États-Unis en avril 1943 puis en France en 1946.

Antoine de Saint-Exupéry débute son activité journalistique en 1932 en livrant ses premiers articles à la revue Marianne nouvellement créée par Gaston Gallimard.

Enquête sur les circonstances de sa disparition

Près de 60 années durant, en dépit de multiples tentatives, le mystère de cette disparition ne sera jamais élucidé.

Un témoignage de 1944 qui prendra tout son sens bien plus tard

Voici quelques années, des copains de Raymond Cantier qui sont dans l’aviation, ont fait le rapprochement entre le témoignage de leur ami et la disparition de Saint-Exupéry.

Je faisais partie d’une petite structure de la Résistance, Jeune République, que dirigeait un gars qui s’appelait René Monory. […] Ce jour-là, avec des copains, nous étions coincés près de Marseilleveyre, à cause des soldats allemands d’une casemate. On se planquait quand j’ai vu un avion allié pris en chasse par un Allemand. […] J’ai dit à un de mes amis : ’Il ne va pas s’en sortir’. […] Les deux avions se suivaient d’assez près. L’Allemand a tiré, l’avion est tombé en mer… R. Cantier

Disparition de Saint-Exupéry : l’allemand a tiré, l’avion est tombé en mer, La Provence

L’hypothèse de 1994 : le cimetière de Carqueiranne

En 1994, une controverse avait surgi autour de nouveaux témoignages, contestés par la famille, affirmant que l’écrivain était enterré dans un cimetière de Carqueiranne, une petite commune du littoral varois. C’est le corps d’un homme

âgé de trente à quarante ans, taille d’environ un mètre soixante quinze, de corpulence vigoureuse, […] auquel adhéraient encore quelques lambeaux d’effets militaires

qui avait été repêché au large de la ville le 3 septembre 1944. La famille du pilote écrivain s’était toujours refusée à son exhumation.

Les expéditions : dans la baie des Anges, 1992 et Giens, 1993

En 1981, Daniel Décot, historien spécialiste de l’aviation, exhume un rapport de la Luftwaffe où l’aspirant Robert Heichele affirme avoir été attaqué ce fameux 31 juillet 1944 par le double fuselage si caractéristique d’un Lightning au-dessus de Castellane. L’Allemand aurait descendu son ennemi en combat singulier, avant de le voir s’abîmer en mer à 12 h 5, à une dizaine de kilomètres au sud de Saint-Raphaël.

Le témoignage de Robert Heichele relance l’enquête ; une expédition de recherches, en octobre 1992, est financée par le Champagne Louis Roederer – dans la baie des Anges, non loin de Nice. A bord du Suroît, navire de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer), les compagnons de route de Saint-Ex, René Gavoille et Jean Israël, ainsi que Frédéric, le petit-neveu de l’aviateur. Pendant quinze jours, les moyens les plus perfectionnés sont utilisés pour localiser l’avion. Sans succès.

Une seconde campagne, dans le golfe de Giens est un nouvel échec.

La pêche miraculeuse de Jean-Claude Bianco, le 7 septembre 1998.

En découvrant, par hasard, le bijou de l’écrivain, Jean-Claude Bianco, pêcheur marseillais propriétaire du chalutier l’Horizon, relance l’affaire contre son gré. Le 7 septembre 1998, ses filets remontent une drôle de concrétion calcaire où brille la chaîne en argent. Outre les nom et prénom du pilote disparu et celui, entre parenthèses, de sa femme, se lisent sur deux autres lignes : « c/o Reynal & Hitchcock », puis « 386, 4th Ave. NYC USA », les éditeurs de l’auteur et leur adresse.

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Le Hameau du Trou à Saint-Antonin sur Bayon

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Mise à jour significative du contenu le 17 février 2014

Tous les randonneurs en route pour la Sainte-Victoire en passant par le refuge Cézanne connaissent le hameau du Trou et sa petite chapelle coincée contre un rocher isolé au milieu d’une aire plate, sur le piémont sud de la montagne.  Afin d’être restauré par le conseil général des Bouches-du-Rhône, il a fait l’objet d’un diagnostic archéologique.

Je remercie infiniment Nathalie Molina et Xavier Chadefaux de l’INRAP de m’avoir communiqué ce document de diagnostic qui a servi de base à mes réflexions.

A l’aide de cette étude, de quelques lectures dont un livre édité par les Amis de Sainte-Victoire, je vous propose un essai de compréhension de ce site. Toute personne pouvant infirmer ou confirmer un élément historique peut m’écrire webmaster de randomania : par avance, je la remercie.

Eléments de chronologie historique de Saint-Antonin sur Bayon

Au second âge du fer, la zone du Trou était déjà occupée ; à l’époque gallo-romaine, le site est réoccupé mais rien ne permet d’affirmer qu’il l’a été de façon continue ensuite. A proximité immédiate du hameau, aucun indice de cette occupation n’a été trouvée.

Les vicomtes de Marseille héritent du domaine de Bayle (plateau du Cengle) vers 950  ; ils donnent le castrum de Saint-Antonin aux moines de Saint-Victor ; puis s’y établit la célèbre commanderie templière en accord avec les moines de Saint-Victor.

En 1550, la seigneurie de Saint-Antonin est rachetée par Antoine Donat puis elle passe aux mains de Jérôme Odaly (vers 1550), Louis de Garnier (1650) dont le père avait épousé la dame de Saint-Antonin et de Bayle. Ce dernier payait toujours une redevance au prieur de Saint-Victor.

Liens entre le Trou et l’Ermitage de Sainte-Victoire

  • Une donation de terre effectuée par Gaspard de Garnier, seigneur de Saint-Antonin et Rousset en 1659 au Sieur Aubert [abbé au prieuré] mentionne à plusieurs reprises les textes de la fin du XVIIè s. Il est question d’un

vallon situé au sud de l’Ermitage jusqu’à un grand rocher qui s’étend en pyramide au milieu dud-vallon, le séparant en deux.

La donation précise que

le sieur de Saint-Antonin donne à bail le terrain (…) pour pouvoir, led-Messire Aubert ou ses successeurs aud-hermittage, y planter arbres, y construire tel bâtiment qu’ils trouveront bon.

Il s’agit  des terrains en forte pente situés au sud de la falaise du côté du jardin des moines. Un espace carré d’à peine 100m de côté (mesuré sur carte IGN), avec un rocher en forme de pyramide bien visible depuis la brèche.

    • L’acte de 1674 (ADBdR 301 E 1292) porte sur un territoire cédé par le Seigneur de Beaurecueil et Roques Hautes, le Sieur (Pierre ?) de Cormis, à Aubert, prieur de l’Ermitage Notre-Dame de Victoire.

Il s’agit d’une terre située au quartier des Armellins terroir dudit Roques Haultes d’une étendue de 31 journaux. Cette terre semble proche du domaine de l’Ermitage ; il est question d’un droit de passage par le Bau Rouge pour aller et venir de Vauvenargues. Cet acte autorise aussi la construction de plusieurs bâtiments, à savoir un four à pain, des fours à chaux, un pigeonnier « à cheval », une garenne et enfin, une chapelle. Approximativement, compte tenu que le journal était une mesure fort variable d’une région à l’autre, ou même d’une commune à l’autre, la terre cédée mesurait approximativement 31*0,33ha ± 10 ha.

Plutôt que 31 journaux, il serait préférable d’écrire 30 + 1 car le journal supplémentaire lui est donné en échange de la promesse de dire une messe à l’ermitage, ou dans une chapelle qu’il construirait à Roques-Hautes.

    • Le document de 1681 (ADBdR 4 B 98) est le texte de la donation avortée – faite par le Sieur Aubert à l’ordre des Camaldules – du domaine de l’Ermitage appartenant au territoire du Seigneur de Beaurecueil.

Le texte rappelle le devoir de dire une messe tous les ans dans la chapelle qui doit être faite. Il est clairement écrit que […] ledit Messire Aubert a fait construire une bastide, fait planter des vignes, arbres fruitiers et autres. M. Court, historien de l’Ermitage, propose d’associer la bastide de 1681 au domaine de Riouffé, dont les ruines sont toujours visibles. Il s’appuie pour cela sur une mention de l’abbé Paulet (1905) : « J. Lambert a reçu en louis d’or et en pièces d’argent et autre monnaie de Me Jacques Riouffé, […] la somme de 123 livres » pour une bastide et son affard qu’il a acquis, et auxquels l’abbé Aubert fait référence dans son testament de 1692.

  • Septembre 1682 : Enquête demandée par l’archevêque

Les habitants réclament une chapelle sur leur territoire pour éviter de se rendre au Tholonet trop éloigné. Parfois, ils utilisent la chapelle du château, ce que n’aime pas le seigneur du lieu. L’archevêque ordonne une visite pour compter le nombre d’habitants de Roques-Hautes. La décision de construire une chapelle est prise. Plus de raison que l’abbé Aubert en construise une.

  • 14 novembre 1682 : vente du terrain de Roques-Hautes
    Les limites du terrain sont clairement exposées ; elles n’ont pas changé depuis la création du fief, et ne changeront pratiquement pas ensuite. A l’est, c’est celle des terres du seigneur voisin de Saint-Antonin.

    … confrontant de levant et de midi de long en long terroir du Sr de Saint-Anthonin, et dudit côté de midi le vallat dit de Bayeu, le grand chemin allant d’Aix à Saint-Anthonin entre deux de couchant [ouest] et septentrion [nord] terres dudit sieur de Beaurecueil.

    Le texte précise que 30 journaux [sont] francs de cense et un journal [est] chargé de quinze sols annuellement […] pour tenir lieu et place de [???] la messe que ledit messire aubert s’était obligé […] dire annuellement pendant qu’il jouirait desdits biens.

Aubert s’était engagé à dire une messe à l’ermitage, tous les ans, pour le Sieur de Beaurecueil et son père, en échange de ce 31è journal à Roques-Hautes ; pour pouvoir en jouir,  les futurs acheteurs devront payer 15 sols de cense.

M. Court suppose que la donation du seigneur de Beaurecueil inclut le hameau du Trou mais d’après le texte précédent, cette terre ne lui appartenait pas. Plusieurs indices par la suite le confirmeront :

  • il est écrit clairement que les limites de sa propriété à l’est, ce sont les terres du seigneur de Saint-Antonin ;
  • les états de capitation de Saint-Antonin (et non Beaurecueil) à cette époque ; en 1704, selon J. Ganne, y figurent 8 ‘David’, identifiés comme demeurant au Trou et au Bouquet ;
  • les recensements de population : en 1728, celui de Saint-Antonin inclut le quartier du Trou ;
  • Au début du XVIIIè la commune est très pauvre : 11 maisons habitées en 1728 dont 4 autour du château, 2 au Trou (sans doute les parents de François et Dominique David recensés sur le cadastre napoléonien de 1827), 4 au Bouquet et 1 à Subéroque. Quelques rares tessons plus anciens confirment cette occupation.
  • Puis on retrouve une trace écrite du hameau du Trou sur la carte de Cassini de 1778 ; il figure avec le même symbole que la Coquille ou Genty, c’est à dire comme établissement agricole : les ruines d’habitations, d’un four à pain, de deux puits, de quelques bâtiments agricoles et d’une aire de battage, les restanques, le confirment ; à l’est un lieu nommé Chateau-Vieux (château de Saint-Antonin sur Bayon), au sud Rieufont (sans doute le Riouffé actuel), à l’ouest la bastide de Roque-Hautes représentée comme un château ou une gentilhommière.
  • Pas de chapelle indiquée sur le cadastre de 1827.
  • On retrouve trace officielle des habitants du Trou sur les recensements de 1841, 1846 et 1851 mais pas au delà.
  • M. Court nous apprend que

    dans ce quartier existe une chapelle ruinée, au pied d’un bloc de pierre surmonté d’une croix. On l’appelle ermitage du Trou. Du temps de l’abbé Fissiaux et de la colonie pénitentiaire de Saint-Pierre sise au château de Beaurecueil [ndlr : la colonie a existé de 1853 à 1880], cette chapelle était fréquentée. Elle était dédiée à Notre-Dame des Sept Douleurs, et le père Rousset en fut longtemps le gardien. Il y a accueilli, après 1875, les pèlerins de la Croix de Provence au retour de leur excursion ; elle est donc mentionnée pour la première fois à la fin du XIXè s.

D’après la biographie de Charles Fissiaux, en 1853 le P. Fissiaux demande à l’état une propriété presque inculte à Beaurecueil pour y créer une ferme modèle pour les détenus qui parviennent à y faire pousser de la vigne ; l’abbé Fissiaux, agronome distingué, a reçu la médaille vermeil pour l’ensemble de ses produits en 1857 au concours agricole ; en 1853, le pape daigne approuver les règles et constitutions de l’Institut de Saint-Pierre-es-Liens.

  • L’abbé Constantin qui recense toutes les chapelles rurales des paroisses du diocèse d’Aix à la fin du XIXè ne cite pas cette chapelle : elle n’est donc pas consacrée, sans office religieux ni abbé désigné.

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La barge gallo-romaine Arles-Rhône 3

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Le bateau romain « le plus complet au monde ». Les fouilles du limon du Rhône ont révélé un « trésor », reconnu comme tel par le ministère de la culture en 2010 : un chaland de 31 mètres de long sur 3 mètres de large, avec sa cargaison de 27 tonnes de pierres. Midi libre, 4 octobre 2013

Historique de la découverte

Environ 50 après J.-C. : sous  le règne de l’empereur Néron, une barge romaine coule dans l’ancien port romain d’Arelate (Arles romaine), sur les berges du Rhône, probablement à cause d’une crue violente alors qu’elle était arrimée au port
2004 : quelques planches de bois sont repérées dans les eaux troubles du fleuve, par dix mètres de fond, dans le cadre des missions de carte archéologique de Luc Long (Le Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines : Drassm)
2007 : mise au jour en rive droite du Rhône (Trinquetaille) à Arles, d’un portrait inédit de Jules César, vraisemblablement exécuté de son vivant ; le marbre est exceptionnellement rare et l’artiste hors du commun. Identification du portrait
Juillet 2008 : première campagne de fouilles
Juillet-octobre 2011 : dernière campagne de fouilles ; la barge est découpée sur place en 10 tronçons 2 à 4 mètres de long puis expédiée dans un laboratoire spécialisé de Grenoble
2009-2010 : exposition César, le Rhône pour mémoire, bilan de 20 années d’exploration dans le Rhône.
Luc Long conservateur en chef du patrimoine DRASSM
Octobre 2010 : début des fouilles
novembre 2010 : la barge est classée trésor national par le ministère de la Culture
2011 : découverte d’un réseau d’adduction d’eau potable sous-fluviales
Juin 2013 : l’arrière du chaland arrive en pièces détachées dans les réserves du musée
A partir du 5 octobre 2013, le Musée départemental Arles antique dévoile l’épave d’un navire romain sortie presque intacte du fleuve et présentée comme si elle était à quai, dans une extension du musée spécialement construite à cet effet. La nouvelle aile de près de 900 m2 met en valeur le rôle du Rhône dans l’Antiquité et présente ainsi plus de quatre cents objets.
2014 : prévision de la publication scientifique des fouilles par le CNRS (dir. Sabrina Marlier).

Les fouilles
Le port

En tant que port fluviomaritime, Arles a dû très vite s’adapter à l’affluence massive et encombrante des amphores. Une fois arrivés à destination, ces emballages, vidés de leur contenu, ne présentent a priori plus aucune utilité. Pour Arles, il semble bien que l’une des préoccupations majeures des colons consiste à stabiliser et surélever les berges en utilisant les milliers d’amphores qui remontent le Rhône. Force est de constater que la grande majorité de ces conteneurs semble bien avoir été jetée massivement dans le Rhône en faisant un dépotoir portuaire. Certains pots enduits de poix – équivalents de nos conserves – portaient la mention peinte de leur contenu : sardines, viandes, olives noires, oignons, etc.

Le limon du fleuve et les couches de déchets disposées au-dessus des vestiges ont protégé ces derniers en les isolant principalement de la lumière et de l’oxygène contenu dans l’eau ainsi que du courant du fleuve.

Le relevage de l’embarcation

Trop lourde pour être soulevée d’un seul tenant, trop grande pour entrer dans les piscines des restaurateurs, l’embarcation va donc être découpée sous l’eau en dix tronçons. Sont rassemblées des équipes d’archéologues, et des spécialistes de travaux subaquatiques (Ipso Facto) qui peuvent rester sous l’eau deux fois plus longtemps qu’un plongeur autonome. Le courant et la faible visibilité compliquent la tâche.

L’épave est découpée à la scie égoïne en 10 tronçons. De chaque côté de celui-ci, des tranchées sont creusées. Un berceau d’acier en forme de U est placé au dessus du tronçon ; les lattes qui forment le fond du berceau sont glissées sous l’épave ; la terre glaise et l’argile sont poussés vers la suceuse. Un contact radio permanent est assuré depuis le quai.

Le berceau est remonté sur la plate-forme percée en son centre d’une piscine. Le ponton est déplacé à l’aide de treuils vers le quai ; une grue le transporte sur un chariot à roulettes. Documentés, puis désassemblés, tout en étant continuellement arrosés, les bois sont emmenés par camion au laboratoire Arc-Nucleart à Grenoble, chargé de la restauration.

A leur sortie de l’eau, les objets en terre cuite sont stockés dans des caisses. Les petits objets sont conditionnés à part. Ils sont pris en charge par la société Ipso Facto, spécialisée dans la conservation préventive des objets archéologiques.

Dossier de presse du CG13
Trois vidéos des opérations de relevage

Techniques de conservation en deux ans seulement

Comment conserver 11 tonnes d’un bois fragile qui ne doit surtout pas sécher ?
Toutes les pièces ont ainsi passé près de 8 mois dans d’immenses bacs remplis de résine, du polyéthylène glycol au faible poids moléculaire pour une imprégnation rapide, dans les locaux d’Arc Nucléart à Grenoble, une unité du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) dédiée à la conservation et la restauration des bois immergés.
Le reliquat d’eau a été éliminé par lyophilisation1 (société Lyophal) ; une congélation à -30° a transformé l’eau en glace ; une mise sous vide a provoqué la sublimation de la glace qui s’est évaporée. En moins de deux mois, le bois était sec, sans déformation : une pièce de 400kg en pesait la moitié à la sortie du lyophilisateur.

Les chimistes ont vérifié l’éventuelle présence de sulfure de fer au niveau des 1700 clous en fer forgé ; en effet, le sulfure de fer combinée à l’humidité de l’air, avait provoqué l’acidification du bois sain sur l’épave suédoise du Vasa à Stockholm ; la société A-Corros ont procédé à l’enlèvement de la majorité des clous de fer et procédé à un curetage préventif, mais les renforts ferreux de part et d’autre de la proue ont été conservés. Une résine polyester avec durcissement par irradiation gamma a rendu le bois impropre à la diffusion d’une éventuelle acidification.

Des bras de soutènement (CIC-ORIO) sont réalisés par un chaudronnier suivant les indications du restaurateur d’ARC-Nucléart. Les pièces sont recollées, consolidées, reconstituées avec des bois modernes pour les parties manquantes. La dernière phase est celle du remontage en atelier à partir des plans dessinés par les archéologues. Le bateau est une nouvelle fois démonté et transporté au musée où il est remonté sur son support.
A Arles, tous les clous d’origine sont remplacés par des tourillons de bois ensuite recouverts d’une tête en résine.
Le budget global est de 9 M €.

La barge

La barge complète, comme le sont le navire royal Vasa de Stockholm, Mary Rose de Portsmouth, les bateaux vikings de Roskilde, mesure 31m de long et 3m de large ; elle est destinée au transport de marchandises. L’état de conservation est tel que le navire possède encore son gouvernail, son mat de halage, une partie de ses poulies et de ses cordages et même la cuisine des mariniers avec leurs ustensiles, leur four et la réserve de bois pour la prochaine cuisson.

Cette barge ressemble-t-elle aux barges de l’époque ?

Celle-ci ressemble à toutes les barges…

pas de quille, un fond plat, des extrémités qui remontent doucement, franc-bord2 de moins d’un mètre, assemblage au moyen de nombreux clous en fer, structure primaire de la coque réalisée en chêne,

…mais possèdent des singularités :

  • un demi tronc monoxyle3 en sapin pour les flancs, sapin de 40m de haut et 300 ans d’âge selon les analyses dendrochronologiques de F. Guibal (CNRS/IMBE), fendu dans sa longueur pour former les flancs,
  • une proue filiforme,
  • un système d’étanchéité par lutage4 : des tissus poissés sont placés entre les planches de la coque ; l’étude de F. Médard (Anatex) montre que les tissus sont des chiffons de laine récupérés et trempés dans de la poix ; cette résine de pin chauffée était également répandue sur le bois de la coque,
  • un caisson central constitué d’éléments amovibles pour la cargaison,
  • elle a conservé tous ses aménagements internes.

La descente du fleuve se fait grâce au courant, la remontée grâce aux hommes qui le halaient depuis la berge par un câble attaché au sommet d’un mât de 3m70.

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