Focale, champ horizontal : comprendre pour mieux identifier les montagnes d’une photo panoramique

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Si vous ne parvenez pas à identifier les sommets d’une montagne sur une photo panoramique, voici quelques éléments d’optique qui peuvent vous aider à comprendre.

Pourquoi est-ce difficile ?

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Indépendamment des conditions météo qui peuvent gêner l’identification :
– une photo est une représentation plate d’un relief : toutes les montagnes, qu’elle que soit leur distance de vous, apparaissent en 2D ; ce qui vous fait dire que l’une est plus loin que l’autre, c’est le manque de netteté ou d’intensité de couleur. Sur la photo ci-dessus, trois plans peuvent être facilement repérés : le premier plan (jusqu’à 30 km environ), le second plan (une seule chaîne de montagne, 30-40 km environ), un dernier plan aux extrémités avec deux formes de couleur gris très clair (plus de 40 km).
– sur cette photo prise au niveau de la mer, une montagne de 880m de haut située à 58km de moi a la même taille que le plateau de Vitrolles haut de 200m située à 15km de moi ; l’avant-plan de faible altitude peut donc cacher un arrière-plan bien plus haut mais plus éloigné.

calcul dimension image pano– deux montagnes proches et l’une derrière l’autre, donnent l’impression de faire partie de la même chaîne
– selon la direction du point de vue, la montagne n’a pas la même forme :
Voici l’exemple de la montagne Vautubière près de Jouques ; 4 vues : deux de face, une de la face sud et l’autre de la face nord ; deux autres vues de profil, l’une de la face Est, l’autre de la face ouest. Sur celle de la face Ouest, remarquez que l’on voit les sommets les uns derrière les autres en enfilade. Celle de la face Est est masquée en partie par une autre montagne qui se trouve devant.

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– le champ de vision de votre appareil photo dépend de sa focale et de la taille du capteur. Un capteur Full Frame (cadre jaune) a une taille de 24x36mm. Les appareils photos numériques ont généralement des capteurs plus petits (cadre vert) ; pour permettre leur comparaison avec le full frame, un coefficient crop factor a été défini, rapport entre la focale équivalente et la focale de votre numérique,  ou rapport entre la diagonale du 24×36 et la diagonale de votre capteur.
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Taille de capteur et rapport de focale

Exemple pour l’iphone 4S de focale équivalent à un 33mm : le champ de vision en largeur s’étale sur 58° environ soit 2*arctan(largeur capteur iPhone/2*focale iPhone) ; le même calcul peut s’opérer sur la focale équivalente donnée par le constructeur. A 30km de distance, la largeur de la scène photographiée s’étale donc sur 33km environ soit distance à l’objet*angle de vision en radians.

Le champ de vision vertical se calcule de la même façon à partir de la hauteur du capteur.

Ci-dessous l’angle de vision d’un grand angle à partir d’un point fictif à 200m d’altitude, à Aix-en-Provence, vers le sud ; en théorie, aux extrémités, on peut donc voir à la fois un bout de la chaîne de la Nerthe et de la Sainte-Baume.

champ de vision

Tableau des angles de vision horizontaux pour une focale équivalente donnée. Extrait du Cours de photographie numérique, René Bouillot, Dunod, 2003

angle vision horizontal

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La barge gallo-romaine Arles-Rhône 3

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Le bateau romain « le plus complet au monde ». Les fouilles du limon du Rhône ont révélé un « trésor », reconnu comme tel par le ministère de la culture en 2010 : un chaland de 31 mètres de long sur 3 mètres de large, avec sa cargaison de 27 tonnes de pierres. Midi libre, 4 octobre 2013

Historique de la découverte

Environ 50 après J.-C. : sous  le règne de l’empereur Néron, une barge romaine coule dans l’ancien port romain d’Arelate (Arles romaine), sur les berges du Rhône, probablement à cause d’une crue violente alors qu’elle était arrimée au port
2004 : quelques planches de bois sont repérées dans les eaux troubles du fleuve, par dix mètres de fond, dans le cadre des missions de carte archéologique de Luc Long (Le Département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines : Drassm)
2007 : mise au jour en rive droite du Rhône (Trinquetaille) à Arles, d’un portrait inédit de Jules César, vraisemblablement exécuté de son vivant ; le marbre est exceptionnellement rare et l’artiste hors du commun. Identification du portrait
Juillet 2008 : première campagne de fouilles
Juillet-octobre 2011 : dernière campagne de fouilles ; la barge est découpée sur place en 10 tronçons 2 à 4 mètres de long puis expédiée dans un laboratoire spécialisé de Grenoble
2009-2010 : exposition César, le Rhône pour mémoire, bilan de 20 années d’exploration dans le Rhône.
Luc Long conservateur en chef du patrimoine DRASSM
Octobre 2010 : début des fouilles
novembre 2010 : la barge est classée trésor national par le ministère de la Culture
2011 : découverte d’un réseau d’adduction d’eau potable sous-fluviales
Juin 2013 : l’arrière du chaland arrive en pièces détachées dans les réserves du musée
A partir du 5 octobre 2013, le Musée départemental Arles antique dévoile l’épave d’un navire romain sortie presque intacte du fleuve et présentée comme si elle était à quai, dans une extension du musée spécialement construite à cet effet. La nouvelle aile de près de 900 m2 met en valeur le rôle du Rhône dans l’Antiquité et présente ainsi plus de quatre cents objets.
2014 : prévision de la publication scientifique des fouilles par le CNRS (dir. Sabrina Marlier).

Les fouilles
Le port

En tant que port fluviomaritime, Arles a dû très vite s’adapter à l’affluence massive et encombrante des amphores. Une fois arrivés à destination, ces emballages, vidés de leur contenu, ne présentent a priori plus aucune utilité. Pour Arles, il semble bien que l’une des préoccupations majeures des colons consiste à stabiliser et surélever les berges en utilisant les milliers d’amphores qui remontent le Rhône. Force est de constater que la grande majorité de ces conteneurs semble bien avoir été jetée massivement dans le Rhône en faisant un dépotoir portuaire. Certains pots enduits de poix – équivalents de nos conserves – portaient la mention peinte de leur contenu : sardines, viandes, olives noires, oignons, etc.

Le limon du fleuve et les couches de déchets disposées au-dessus des vestiges ont protégé ces derniers en les isolant principalement de la lumière et de l’oxygène contenu dans l’eau ainsi que du courant du fleuve.

Le relevage de l’embarcation

Trop lourde pour être soulevée d’un seul tenant, trop grande pour entrer dans les piscines des restaurateurs, l’embarcation va donc être découpée sous l’eau en dix tronçons. Sont rassemblées des équipes d’archéologues, et des spécialistes de travaux subaquatiques (Ipso Facto) qui peuvent rester sous l’eau deux fois plus longtemps qu’un plongeur autonome. Le courant et la faible visibilité compliquent la tâche.

L’épave est découpée à la scie égoïne en 10 tronçons. De chaque côté de celui-ci, des tranchées sont creusées. Un berceau d’acier en forme de U est placé au dessus du tronçon ; les lattes qui forment le fond du berceau sont glissées sous l’épave ; la terre glaise et l’argile sont poussés vers la suceuse. Un contact radio permanent est assuré depuis le quai.

Le berceau est remonté sur la plate-forme percée en son centre d’une piscine. Le ponton est déplacé à l’aide de treuils vers le quai ; une grue le transporte sur un chariot à roulettes. Documentés, puis désassemblés, tout en étant continuellement arrosés, les bois sont emmenés par camion au laboratoire Arc-Nucleart à Grenoble, chargé de la restauration.

A leur sortie de l’eau, les objets en terre cuite sont stockés dans des caisses. Les petits objets sont conditionnés à part. Ils sont pris en charge par la société Ipso Facto, spécialisée dans la conservation préventive des objets archéologiques.

Dossier de presse du CG13
Trois vidéos des opérations de relevage

Techniques de conservation en deux ans seulement

Comment conserver 11 tonnes d’un bois fragile qui ne doit surtout pas sécher ?
Toutes les pièces ont ainsi passé près de 8 mois dans d’immenses bacs remplis de résine, du polyéthylène glycol au faible poids moléculaire pour une imprégnation rapide, dans les locaux d’Arc Nucléart à Grenoble, une unité du Commissariat à l’énergie atomique (CEA) dédiée à la conservation et la restauration des bois immergés.
Le reliquat d’eau a été éliminé par lyophilisation1 (société Lyophal) ; une congélation à -30° a transformé l’eau en glace ; une mise sous vide a provoqué la sublimation de la glace qui s’est évaporée. En moins de deux mois, le bois était sec, sans déformation : une pièce de 400kg en pesait la moitié à la sortie du lyophilisateur.

Les chimistes ont vérifié l’éventuelle présence de sulfure de fer au niveau des 1700 clous en fer forgé ; en effet, le sulfure de fer combinée à l’humidité de l’air, avait provoqué l’acidification du bois sain sur l’épave suédoise du Vasa à Stockholm ; la société A-Corros ont procédé à l’enlèvement de la majorité des clous de fer et procédé à un curetage préventif, mais les renforts ferreux de part et d’autre de la proue ont été conservés. Une résine polyester avec durcissement par irradiation gamma a rendu le bois impropre à la diffusion d’une éventuelle acidification.

Des bras de soutènement (CIC-ORIO) sont réalisés par un chaudronnier suivant les indications du restaurateur d’ARC-Nucléart. Les pièces sont recollées, consolidées, reconstituées avec des bois modernes pour les parties manquantes. La dernière phase est celle du remontage en atelier à partir des plans dessinés par les archéologues. Le bateau est une nouvelle fois démonté et transporté au musée où il est remonté sur son support.
A Arles, tous les clous d’origine sont remplacés par des tourillons de bois ensuite recouverts d’une tête en résine.
Le budget global est de 9 M €.

La barge

La barge complète, comme le sont le navire royal Vasa de Stockholm, Mary Rose de Portsmouth, les bateaux vikings de Roskilde, mesure 31m de long et 3m de large ; elle est destinée au transport de marchandises. L’état de conservation est tel que le navire possède encore son gouvernail, son mat de halage, une partie de ses poulies et de ses cordages et même la cuisine des mariniers avec leurs ustensiles, leur four et la réserve de bois pour la prochaine cuisson.

Cette barge ressemble-t-elle aux barges de l’époque ?

Celle-ci ressemble à toutes les barges…

pas de quille, un fond plat, des extrémités qui remontent doucement, franc-bord2 de moins d’un mètre, assemblage au moyen de nombreux clous en fer, structure primaire de la coque réalisée en chêne,

…mais possèdent des singularités :

  • un demi tronc monoxyle3 en sapin pour les flancs, sapin de 40m de haut et 300 ans d’âge selon les analyses dendrochronologiques de F. Guibal (CNRS/IMBE), fendu dans sa longueur pour former les flancs,
  • une proue filiforme,
  • un système d’étanchéité par lutage4 : des tissus poissés sont placés entre les planches de la coque ; l’étude de F. Médard (Anatex) montre que les tissus sont des chiffons de laine récupérés et trempés dans de la poix ; cette résine de pin chauffée était également répandue sur le bois de la coque,
  • un caisson central constitué d’éléments amovibles pour la cargaison,
  • elle a conservé tous ses aménagements internes.

La descente du fleuve se fait grâce au courant, la remontée grâce aux hommes qui le halaient depuis la berge par un câble attaché au sommet d’un mât de 3m70.

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Archéologie de l’aqueduc romain de la Traconnade d’après ses vestiges

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Les sources

D’après l’association Peyrolles Rétro, le début de l’aqueduc serait visible depuis le chemin de la Palunette, à Bastide Thénoux, sous forme d’une petite entrée taillée dans le roc mais plus de trace de la prise d’eau. Voir le montage Dailymotion sur les vestiges

Canal

image02.jpgIMG_8828.JPGLe premier vestige taillé en plein rocher, ce qui est assez rare dans le monde romain, est proche de la prise d’eau, en bordure de route. Précédé de socles rocheux, il devait comporter un aménagement spécial. L’intérieur du canal est en bon état. Par endroit les concrétions ont disparu, laissant apparaître des pierres taillées en grand appareil. IMG_8830.JPGPour avoir les mains libres pour travailler, les ouvriers posaient leur lampe à huile dans des petits logements creusés dans la roche à intervalles réguliers. La circulation dans le radier1 y est possible sur plusieurs dizaines de mètres, la hauteur du canal étant d’1m60 environ.

le soubassement des piédroits, construits et s’appuyant à certains endroits au-dessus de la roche taillée au niveau du radier.

Particularités observées :

  • le soubassement des piédroits, construits et s’appuyant au-dessus de la roche taillée, au niveau du radier.
  • Un passage étonnant, où l’on trouve successivement l’aqueduc construit entièrement, puis un passage sous une voûte taillée dans la roche, et au bout de quelques mètres, à nouveau la construction. On sait que les ouvrages de type ‘tunnel’ étaient creusés par deux équipes allant  à la rencontre l’une de l’autre (exemples célèbres en Algérie à Saldae, et sur l’aqueduc du Gier) selon les principes de Vitruve.

IMG_8562.JPGIMG_8673.JPGLe plus souvent, sur Peyrolles et Jouques, les vestiges sont des voûtins (portion de voûte) en claveaux, variables en nombre, qui émergent du sol, à peine visibles mais permettent de marquer le tracé de l’aqueduc.

Regards de visite

Eléments essentiels pour la construction d’un aqueduc, ces derniers – appelés alors puits sur les tunnels –  servirent au moment de la construction, à déterminer le tracé, à vérifier le niveau de la pente, à dégager les déblais et à ventiler les ouvriers ; l’aqueduc en usage, ils permirent son accès afin d’assurer l’entretien de l’ouvrage. JC Litaudon

IMG_8564.JPGDe nombreux regards2 permettent de contrôler ou de nettoyer la conduite ; rectangulaires, bordés de parois en petit appareil, ils sont toujours soigneusement voûtés en claveaux3, le plus souvent placés de façon régulière tout le long du parcours, tous les 72 mètres ce qui correspondrait à deux actus4, par analogie avec les principes énoncés par Vitruve et Pline l’Ancien (37 à 79 ap, livre XXXI, ch. XXXI) […]: « …il faudra faire des regards de visite tous les deux actus« .
Cette règle a été appliquée à l’aqueduc du Gier à Lyon, en effet une recherche systématique, depuis 1980, en a permis le recensement de près de 90 à ce jour, tous de plan rectangulaire. Selon J.C. Litaudon, ils sont de deux types, en alternance, de petit module (largeur du canal, 0,60 approx.), de grand module (90 x 90), ces derniers ayant un fond plus bas que le radier1 du canal, bac destiné à récupérer les sédiments ; les intervalles entre eux, vont de 68 à 80 m. Mais en zone plane et linéaire, les intervalles sont alors proches de 77m, deux actus romains de 120 pieds.

Ils peuvent être placés également à proximité de points sensibles du parcours comme les ponts de franchissement de vallons. A la verticale de ces regards, on peut observer sur plusieurs aqueducs romains  des bacs de décantation pour piéger les fines (impuretés véhiculées par le flux) : cela ne semble pas être le cas de la Traconnade.

IMG_8681.JPGDes encoches – opes5 – creusées dans les parois pour l’emplacement d’échafaudages facilitent l’accès au conduit durant la construction. Mais n’étant pas situées en vis à vis, il devait y avoir un autre dispositif mobile pour descendre au niveau du canal.
Le regard le plus difficile d’accès, est profond de plus de 2m ; les opes en vis à vis, sont bien visibles. Un morceau de la dalle de couverture se trouve probablement dans le fond.

Tableau et photos des vestiges de l’aqueduc de Gier, Groupe archéologique Forez-Jarez

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