Les trois chapelles de Digne sur le mont Calvaire

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Lcircuit de randonnée des trois chapelles, facile, passe par trois chapelles bien connues des Dignois : la chapelle Notre-Dame de Lourdes, la chapelle Saint-Vincent et la chapelle de la Croix. Chacune a ‘son’ histoire, ‘son destin’, mais qui les connait aujourd’hui ?

Notre Dame de Lourdes, réplique de la balisique de Lourdes

IMG_7116.JPGLa grotte sous la chapelleLa plus surprenante, Notre Dame de Lourdes, au dessus de l’ancien petit séminaire, Notre Dame de Lourdes se veut en effet une réplique en miniature de la balisique Notre Dame de Lourdes : elle est bâtie au-dessus d’une petite grotte. Le chanoine Reymond, directeur principal du petit séminaire, la fait construire en 1870. Deux messes matinales y étaient célébrées chaque samedi de mai et juin et attiraient beaucoup de monde. Comme seule une cinquantaine de personnes pouvaient y pénétrer, les autres demeuraient sur la plate-forme devant la porte. Les soldats se recommandaient à elle, les ex-voto en témoignent, les étudiants y priaient avant leurs examens.

IMG_7119Elle fut restaurée en 1958 pour le centenaire des apparitions de Marie à Lourdes. On lui donna alors une voûte bleu ciel avec des bordures aux couleurs de la Provence rouge et or, partiellement visibles aujourd’hui. Une nouvelle série de travaux fut effectuée en 1977 mais peu de temps après, de jeunes vandales l’ont saccagée : un clocheton a été abattu, la cloche a disparu, les vitraux ont été brisés à la carabine, les murs couverts de graffitis, les portes arrachées et le plancher défoncé.

La chapelle Saint-Vincent et le prieuré, mille ans d’épreuves

Repères historiques

  • IMG_7138Située sur la colline dominant la chapelle Notre Dame du Bourg, la chapelle est mentionnée  en 1180 dans les bulles d’Alexandre III et en 1184 dans celle de Lucius III. Saint-Vincent, premier évêque de Digne, aurait fait un séjour sur cette colline.
  • 1349 : transfert des reliques de Saint-Vincent à la cathédrale
  • Le sanctuaire devient un prieuré du chapitre de Notre Dame du Bourg et en dépend jusqu’en 1495, date à laquelle l’évêque Antoine Guiramand l’incorpore à l’ordre des Frères de la Sainte-Trinité et de la rédemption des captifs qui y établissent leur couvent.
  • Durant les guerres de religion, Lesdiguières attaqua la chapelle que l’on avait fortifiée et qui résista une journée ; pendant la nuit, les soldats chargés de la défendre y mirent le feu et s’enfuirent. L’église et le couvent restèrent à l’état de ruines jusqu’au moment où Honnorat Blanc, curateur des biens du monastère, parvint à remonter en partie l’église du couvent. Au sommet de l’arceau ogival séparant le sanctuaire de la nef, se lisait encore en 1839 l’inscription signum redemptionis nostrae 1597.
  • L’édifice fut rétablie non plus en pierres de taille mais en tuf équarri. L’évêque de Digne lors de sa visite épiscopale  en 1606, rapporte que l’église est à demi couverte et assez mal bâtie. Les Trinitaires déménagent en ville.
  • Vendue en 1770 au Grand Séminaire, confisquée pendant la révolution comme bien national, elle fut vendue à Charles et Antoine Bayle. Seule l’abside pouvant servir de grenier à foin, fut sauvée.
  • En 1924, elle revint au clergé qui y célébra la messe pendant quelques années puis l’abandonna.
  • Bombardée en 1944, elle a été restaurée en 1950 grâce aux indemnités de dommages de guerre.

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Le mur de la peste, longue barrière sanitaire

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L’histoire de l’arrivée de la peste par le Grand Saint-Antoine

Début 1720 : le vice-roi de Sardaigne avait rêvé la nuit précédant l’arrivée du Grand Saint-Antoine (un navire trois-mâts, à la mode hollandaise) que la peste ravageait son gouvernement : il refusa au navire l’entrée du port de Cagliari (Sardaigne). Dans sa deuxième escale à Tripoli le capitaine Chataud prit le 3 avril quelques turcs qu’il devait déposer à Chypre. L’un d’eux mourut subitement. Quelques jours plus tard, les deux marins qui lui rendirent hommage moururent également. En Toscane, à Livourne, ni le médecin ni le chirurgien ne reconnurent la peste alors que trois nouveaux matelots venaient d’être frappés. Le navire perdit 7 hommes mais sa patente1 était nette. A cette époque avait été mis en place le régime des « patentes » pour lutter contre les contaminations en provenance du Moyen-Orient où la peste régnait pratiquement à l’état endémique.

25 Mai 1720
A son arrivée à Marseille Jean-Baptiste Chataud, le capitaine du Grand St-Antoine avait une patente « nette ».  Les cales sont pleines de soieries destinées à la foire de Beaucaire représentant une forte valeur marchande.  Le capitaine ayant de fortes présomptions de la présence de la peste à bord, fait donc tout naturellement mettre navire, équipage et cargaison en quarantaine dans le port de Pomègues, une des îles du Frioul. A Pomègues, François Lion agonise : c’est le 8ème mort. Les 11 intendants se prononcent : isoler le cadavre aux infirmeries et isoler le vaisseau dans l’anse de la Grande Prise. Le chirurgien du bureau de santé ne reconnaît pas les symptômes de la peste : le marin n’a pas les bubons révélateurs de la maladie. Pourtant, il a été contaminé probablement lors de l’escale à Livourne au cours de laquelle il a transporté les corps des 3 autres marins. En cas de patente brute, l’équipage était retenu aux infirmeries, la cargaison subissant plusieurs parfums. Les intendants trop confiants admettent aux Infirmeries d’Arenc (Marseille) passagers et marchandises. Plusieurs caisses chargées de marchandises de contrebande furent introduites dans les bas quartiers.

Les « Nouvelles infirmeries » ont été construites entre 1663 et 1668 à Saint-Marcel d’Arenc. Un an plus tard, en mars 1669, Colbert accordait à Marseille le monopole du commerce avec le Levant. Le Bureau de santé de Marseille, crée en 1640, devint très rapidement supérieur en technique à tous les autres, grâce à la politique menée par les intendants de santé locaux. Ce Bureau de santé fut supprimé le 24 décembre 1850.

4 juin 1720 : Jean Baptiste Estelle, armateur et échevin, voit d’un mauvais oeil ses soieries bloquées ; fort de la patente nette et de l’attestation du chirurgien, le premier échevin met fin à la quarantaine au bout de 18 jours et autorise marchandises puis voyageurs et équipage à débarquer.

Les échevins mettront un mois avant de reconnaître officiellement l’épidémie. Ils ordonnent aux 3000 miséreux de la ville de la quitter sous 24h. Ce qui ne fera qu’augmenter la propagation…

22 juin 1720 : premier décès à Marseille.

27 juin 1720 : le Grand Saint-Antoine est placé en quarantaine à l’Île de Jarre

31 juillet 1720 : le parlement de Provence reprend les rênes en main  et décide d’isoler Marseille. On met injustement toute la responsabilité du fléau sur Chataud qui est enfermé au Château d’If pendant plus de deux ans.

4 septembre : 1ère ligne sanitaire sur la rive droite de la Durance, de Bonpas à Mérindol

La peste atteint Apt, le 25 septembre.

26 Septembre 1720 : le grand Saint-Antoine est brûlé et coule dans l’anse de Jarron par ordre du Régent. Les mobiliers archéologiques remontés du Grand Saint Antoine sont aujourd’hui exposés au musée de l’Hôpital Caroline sur l’ile de Ratonneau. Le vice-légat établit la 2ème ligne sanitaire de la Durance au Ventoux, la France de Bollène à Embrun.

La peste atteint Carpentras le 24 octobre 1720 où l’on expose les reliques de saint Siffren et de Saint-Cloud pour éloigner le fléau.

22 février 1721 : un arrêt du Conseil du roi interdit le commerce de marchandises avec les ports de Provence
février 1721 : le vice-légat2 interdit les fêtes et le carnaval.

Des cordons sanitaires (sous forme de mur de pierres sèches ou fossé) existent donc bien le plus souvent aux frontières entre la Provence, le Dauphiné et le Comtat Venaissin ; en février 1721, les trois états sont obligés de s’entendre pour être efficaces ; la surveillance est hélas parfois relâchée sous la pression de certains habitants.

cordons sanitaires (selon étude Alice Bonnet)

17 mars 1721 : les travaux de la muraille commencent et se terminent fin juillet, gardée par les comtadins.

17 août 1721 : la peste est à Avignon

16 septembre 1721Avignon étant déclarée officiellement en état d’épidémie, le vice-légat2 prononce la quarantaine. La maladie se propage dans le Comtat Venaissin. Une troisième barrière sanitaire mobile est établie entre Cavaillon et Orange. Les soldats du Régent remplacent les Comtadins sur le mur.

Méthamis, le 21 septembre 1721, le bureau de santé ordonnait :

exemple d'un billet de sante (Pierre Thibaud 12-novembre-1720)jpg

Que ceux des habitants qui voudraient aller travailler à la vendange hors du terroir ne pouvaient aller qu’à Carpentras ou autres lieux plus proches ; qu’à leur retour ils apporteraient une attestation des personnes chez qui ils auraient travaillé et le nombre de jours qu’ils auraient travaillé chez chacun, au défaut de laquelle attestation ils ne seraient plus reçus dans le lieu.

D’une façon générale, en ce temps de vendanges, les raisins ne pouvaient attendre et de nombreux consuls ou bureaux de santé remirent aux vendangeurs de leur commune une « carte marquée aux armes de la ville » leur servant de laissez-passer.

Juillet 1722, la situation évolue rapidement. Le mur se retourne alors contre ceux qui l’avaient construit et ce sont désormais les français, qui s’occupent de la troisième ligne.

2 octobre 1722 : fin de la peste à Avignon

1er décembre 1722 : levée des barrières du Comtat le long de la troisième ligne

31 janvier 1723 : levée de toutes les lignes

La peste de 1720 dans le livre de Gaffarel sur Gallica

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Archéologie de l’aqueduc romain de la Traconnade d’après ses vestiges

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Les sources

D’après l’association Peyrolles Rétro, le début de l’aqueduc serait visible depuis le chemin de la Palunette, à Bastide Thénoux, sous forme d’une petite entrée taillée dans le roc mais plus de trace de la prise d’eau. Voir le montage Dailymotion sur les vestiges

Canal

image02.jpgIMG_8828.JPGLe premier vestige taillé en plein rocher, ce qui est assez rare dans le monde romain, est proche de la prise d’eau, en bordure de route. Précédé de socles rocheux, il devait comporter un aménagement spécial. L’intérieur du canal est en bon état. Par endroit les concrétions ont disparu, laissant apparaître des pierres taillées en grand appareil. IMG_8830.JPGPour avoir les mains libres pour travailler, les ouvriers posaient leur lampe à huile dans des petits logements creusés dans la roche à intervalles réguliers. La circulation dans le radier1 y est possible sur plusieurs dizaines de mètres, la hauteur du canal étant d’1m60 environ.

le soubassement des piédroits, construits et s’appuyant à certains endroits au-dessus de la roche taillée au niveau du radier.

Particularités observées :

  • le soubassement des piédroits, construits et s’appuyant au-dessus de la roche taillée, au niveau du radier.
  • Un passage étonnant, où l’on trouve successivement l’aqueduc construit entièrement, puis un passage sous une voûte taillée dans la roche, et au bout de quelques mètres, à nouveau la construction. On sait que les ouvrages de type ‘tunnel’ étaient creusés par deux équipes allant  à la rencontre l’une de l’autre (exemples célèbres en Algérie à Saldae, et sur l’aqueduc du Gier) selon les principes de Vitruve.

IMG_8562.JPGIMG_8673.JPGLe plus souvent, sur Peyrolles et Jouques, les vestiges sont des voûtins (portion de voûte) en claveaux, variables en nombre, qui émergent du sol, à peine visibles mais permettent de marquer le tracé de l’aqueduc.

Regards de visite

Eléments essentiels pour la construction d’un aqueduc, ces derniers – appelés alors puits sur les tunnels –  servirent au moment de la construction, à déterminer le tracé, à vérifier le niveau de la pente, à dégager les déblais et à ventiler les ouvriers ; l’aqueduc en usage, ils permirent son accès afin d’assurer l’entretien de l’ouvrage. JC Litaudon

IMG_8564.JPGDe nombreux regards2 permettent de contrôler ou de nettoyer la conduite ; rectangulaires, bordés de parois en petit appareil, ils sont toujours soigneusement voûtés en claveaux3, le plus souvent placés de façon régulière tout le long du parcours, tous les 72 mètres ce qui correspondrait à deux actus4, par analogie avec les principes énoncés par Vitruve et Pline l’Ancien (37 à 79 ap, livre XXXI, ch. XXXI) […]: « …il faudra faire des regards de visite tous les deux actus« .
Cette règle a été appliquée à l’aqueduc du Gier à Lyon, en effet une recherche systématique, depuis 1980, en a permis le recensement de près de 90 à ce jour, tous de plan rectangulaire. Selon J.C. Litaudon, ils sont de deux types, en alternance, de petit module (largeur du canal, 0,60 approx.), de grand module (90 x 90), ces derniers ayant un fond plus bas que le radier1 du canal, bac destiné à récupérer les sédiments ; les intervalles entre eux, vont de 68 à 80 m. Mais en zone plane et linéaire, les intervalles sont alors proches de 77m, deux actus romains de 120 pieds.

Ils peuvent être placés également à proximité de points sensibles du parcours comme les ponts de franchissement de vallons. A la verticale de ces regards, on peut observer sur plusieurs aqueducs romains  des bacs de décantation pour piéger les fines (impuretés véhiculées par le flux) : cela ne semble pas être le cas de la Traconnade.

IMG_8681.JPGDes encoches – opes5 – creusées dans les parois pour l’emplacement d’échafaudages facilitent l’accès au conduit durant la construction. Mais n’étant pas situées en vis à vis, il devait y avoir un autre dispositif mobile pour descendre au niveau du canal.
Le regard le plus difficile d’accès, est profond de plus de 2m ; les opes en vis à vis, sont bien visibles. Un morceau de la dalle de couverture se trouve probablement dans le fond.

Tableau et photos des vestiges de l’aqueduc de Gier, Groupe archéologique Forez-Jarez

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